Bertrand LAHUTTE
Résumé
Force est de constater la prégnance des troubles bipolaires, dans les travaux actuels, tout comme dans les diagnostics évoqués. L’usage sémantique nous en donne l’indication. Spectres, endophénotypes, indices (de bipolarité), se trouvent convoqués pour tenter de mieux appréhender des tableaux cliniques réputés trompeurs, voire susceptibles d’être méconnus. Les enjeux annoncés sont à la clé, tout particulièrement dans le registre de la thérapeutique, dont nous percevons les mutations ou les déplacements des indications (autrefois antipsychotiques, certaines molécules sont aujourd’hui thymorégulatrices…).
Qu’en est-il des fondements de cette approche, à vrai dire assez distante de la notion classique de « circularité », elle-même prototypique de la prise en compte de l’évolution diachronique des troubles ? S’agit-il d’un engouement de l’actualité ou d’un changement de perspective étayé par la clinique ? Ne pouvant prétendre à une réponse univoque, nous nous proposons de mettre en question le positionnement actuel des troubles bipolaires au sein de la nosographie psychiatrique, à partir de l’hypothèse d’une perspective « unitaire » de la pathologie de l’humeur. En effet, les dérèglements de l’humeur sont fréquemment qualifiés par la symptomatologie les accompagnant, en particulier les manifestations délirantes, productives. Elles sont appréhendées par le terme de « caractéristiques psychotiques », se trouvant de facto rattachées de façon uniciste au trouble de l’humeur. Il ne s’agit pas ici de questionner la pertinence d’une démarche diagnostique, qui reste à évaluer au cas par cas, mais de souligner la dimension de présupposition, qui se rattache à ce qui serait prévalent au sein de la clinique, à travers une approche purement symptomatique.
Ainsi, nous nous trouvons confrontés à ce que serait une conception « harmonieuse » des fluctuations thymiques, dont la dysharmonie rendrait compte d’une clinique autrefois appréhendée dans le champ de la psychose. Ceci nous invite à mettre en tension l’incidence de la notion d’« unité » dans l’évolution des classifications nosographiques, avec la persistance d’une velléité d’harmonie ou d’adéquation, bien distante des effets de déplacement des affects.
Une conquête diagnostique
L’année 1854 voit la confrontation de deux hommes à l’Académie Impériale de Médecine : Jules Baillarger et Jean-Pierre Falret, le premier exposant sa « folie à double forme » et le second sa « folie circulaire ». Si la lecture actuelle de cet événement « antique » de l’histoire de la psychiatrie retient principalement la querelle des deux hommes et la rancune qui a succédé à leur lutte pour l’obtention de la reconnaissance de la priorité de publication. A la considérer plus attentivement, elle préfigure les débats qui animeront la Société Médico-Psychologique à la fin des années 1880, autour des psychoses chroniques.
La période est en effet sensible dans la constitution encore récente du savoir psychiatrique. Les historiens tendent à souligner, dans la création des entités des premiers aliénistes, une tendance déjà « bipolaire » par ses oscillations entre classification et description. Pinel se trouve, dans la mythologie psychiatrique, consacré comme le fondateur du dogme de l’aliénation mentale, avec ses avatars de Psychose Unique chez les auteurs germaniques. Cette intégration de la folie dans le discours médical, dont les effets de ségrégation mériteraient d’être questionnés par ailleurs, induit par la suite un effet démultiplicateur dans l’effort de description des formes cliniques de l’aliénation, de la manie, dont Jean-Étienne Esquirol est vraisemblablement le plus illustre représentant.
Quelle visée ont pu tenir les tentatives de leurs successeurs, dans la réorganisation des entités et la proposition en série d’ouvrages nosographiques ?
Précisément, Falret se trouve classiquement consacré comme un représentant central de la position française. En effet, dans un texte célèbre, il s’oppose au déploiement des entités monomaniaques, pour promouvoir l’entrée des troubles psychiques dans le champ des « maladies mentales ». Il tente ainsi de mettre un terme au règne d’une entité unique, « l’aliénation mentale » et au foisonnement des descriptions cliniques (les monomanies).
« Nous n’admettons jamais l’unité du délire dans l’aliénation mentale. Nous avons protesté, pendant toute notre vie, contre cette prétendue unité du délire, limitée à une seule idée, ou une seule série d’idées. […] Nous pensons que la doctrine de la monomanie ne repose pas seulement sur des observations cliniques incomplètes, mais sur une théorie psychologique erronée, relativement à la génération des idées délirantes et à l’évolution naturelle des maladies mentales. (1) […] Nous voyons un abîme profond entre la raison et la folie, et pour nous cet abîme est comblé par la maladie. Celle-ci, caractérisée par des symptômes physiques et par des symptômes moraux, donne naissance à une perturbation générale de l’intelligence et du moral, qui est le premier phénomène des maladies mentales […]. C’est sur ce sol morbide primitif que les conceptions délirantes germent et se développent successivement. […] Le fond maladif de la sensibilité et de l’intelligence préexiste donc aux conceptions délirantes et leur donne naissance, et ce n’est pas l’idée délirante qui engendre cet état général de l’intelligence et du moral, par voie de déduction logique, comme on le croit généralement. […] Nous sommes convaincus que l’on n’arrivera à une étude et à un classement scientifiques des variétés de l’aliénation partielle qu’à la condition expresse de fixer son attention sur ce que nous appelons le fond de la maladie, qui existe chez tous et à toutes les périodes, mais qui est surtout facile à observer au début ou dans les paroxysmes, au lieu de borner son examen aux idées prédominantes, ou aux sentiments exclusifs, qui sont la partie saillante de l’affection mentale et qui peuvent varier, se modifier ou se transformer, pendant son cours, sans qu’elle change pour cela de nature ou de caractère ! »
Classification ou description ?
Ce développement de Falret dépasse de très loin ses travaux sur la folie circulaire. Il expose sa conception pathogénique des maladies mentales, reléguant les thèses psychogéniques ou l’intérêt pour les particularités de la présentation clinique, à des positions de moindre importance, mettant par là en valeur une vision laissant une place plus importante au savoir médical, seul à même de ne pas laisser le clinicien se faire berner par une présentation clinique extemporanée.
Nous trouvons un écho de cette relecture très médicale de la clinique dans le processus dit de « remédicalisation » de la psychiatrie, accompagnant la publication des versions 3 et suivantes du DSM et remettant en avant la question de l’origine, de la nature essentielle du trouble, dont ont pu s’emparer la psychiatrie biologique et son versant génétique par la suite.
Nous pouvons peut-être faire le crédit à Falret d’une vision moins réductrice, car son propos semble davantage à replacer dans les errements entre « fond » et « forme », auxquels se confrontent les classiques dans leur défrichage de la clinique et qu’illustrent particulièrement les débats – déjà évoqués – de la SMP en cette seconde moitié du XIX° siècle.
Falret se propose de considérer une perspective évolutive dans la clinique psychiatrique, soulignant ainsi l’importance d’une vision globale et diachronique dans la clinique. Si ce fait semblait relativement accepté pour les psychoses délirantes chroniques, notamment avec les différentes « phases » de déploiement des délires chroniques de Morel, puis Magnan, le postulat d’un « génie évolutif » semble quelque peu différent chez Falret, dont l’attention semble davantage attirée par les stéréotypies de l’évolution temporelle de ces troubles.
« La folie circulaire est donc caractérisée par l’évolution successive et régulière de l’état maniaque, de l’état mélancolique et d’un intervalle lucide plus ou moins prolongé. Elle varie d’intensité et de durée dans l’ensemble et dans chacune de ses périodes, soit chez les divers malades, soit aux divers accès chez le même malade (2).
Aussi pensons-nous que c’est une véritable forme de maladie mentale, parce qu’elle consiste dans un ensemble de symptômes physiques, intellectuels et moraux, toujours identiques à eux-mêmes dans les diverses périodes et se succédant dans un ordre déterminé, de telle sorte qu’en constatant certains d’entre eux, on peut d’avance annoncer l’évolution ultérieure de la maladie. » (3)
Préciser le diagnostic et prédire le devenir
L’approche réductionniste de Falret s’accompagne d’un vœu de prédiction ou d’une détermination possible de l’évolution des troubles. Il se place dans un regard objectivant et invite à ne pas se perdre dans les particularités du cas.
« On est vraiment stupéfait de voir la monotonie et l’uniformité de l’existence physique et morale de ces malades atteints de folie circulaire, et de telles observations sont bien propres à faire sentir combien on a tort, combien il est peu scientifique de croire que tout est individuel et accidentel dans les manifestations délirantes des aliénés. Plus on observe profondément ces malades, plus on est convaincu que les variétés si nombreuses des maladies mentales, fondées sur l’objet du délire, sur les idées dominantes, et qui paraissent, au premier abord, n’avoir d’autres limites que l’imagination de l’homme, sont, au contraire, réductibles à un petit nombre de formes spéciales que l’observation ultérieure fera découvrir. »
Très critique vis-à-vis de l’approche « humaniste » de ses prédécesseurs, et dubitatif quant aux espoirs du traitement moral, Falret ouvre une perspective putative et spéculative dans son approche des maladies mentales.
« Ce qu’il faut rechercher, » écrit-il en 1864, « ce serait la marche et les diverses périodes des espèces véritables de maladies mentales, encore inconnues jusqu’à ce jour, mais que l’étude attentive des phases successives de ces affections permettra de découvrir. L’idée de forme naturelle implique en effet celle d’une marche déterminée, et réciproquement, l’idée d’une marche naturelle à prévoir suppose l’existence d’une espèce naturelle de maladie, ayant son évolution. Là, réside, selon nous, le progrès le plus considérable à accomplir dans notre spécialité. »
Plusieurs perspectives du Tout
A partir de ce long développement sur la position de Falret, nous nous proposons d’évoquer en quoi il nous semble particulièrement illustrer la constitution de l’entité « trouble bipolaire ».
En premier lieu, il nous semble fondamental de préciser que ces considérations sur l’origine et les formes évolutives des maladies mentales ne peuvent être envisagées sans une découverte occultée quelque temps, mais se faisant de plus en plus insistante : le 21 novembre 1822, en effet, Antoine-Laurent-Jessé Bayle soutient une thèse dans laquelle il entreprend de « prouver que l’aliénation mentale est quelquefois le symptôme d’une inflammation chronique de l’arachnoïde ». De cette révélation de la clinique de la Paralysie Générale, Bayle publie deux ouvrages : la Nouvelle doctrine des maladies mentales et le Traité des maladies du cerveau et de ses membranes. Dans une discipline ne distinguant pas l’actuelle dichotomie entre neurologie et psychiatrie, cette découverte induit une difficulté supplémentaire et même si le treponema pallidum ne sera identifié que bien plus tard (1905), la présupposition d’une organicité influe dès lors sur la recherche clinique. Le modèle d’une « maladie » se trouve ainsi parfaitement justifié, permettant d’inclure la logique évolutive de cette maladie, mais au risque d’éclipser la logique subjective, par ce regard universalisant.
Un franchissement supplémentaire peut-être isolé avec Kraepelin, qui aborde sa nosographie par une approche quasiment exclusivement évolutive, confinant à la sanction d’un déterminisme morbide(4). L’introduction de son Traité l’illustre : « Dans le développement du présent ouvrage, l’édition actuelle constitue le pas ultime, décisif, qui va de la conception symptomatique à la conception clinique de la folie. Cette transformation du point de vue, dont les besoins pratiques m’ont montré de plus en plus fermement la nécessité, se caractérise avant tout dans la délimitation et le groupement de ces tableaux pathologiques. Partout, l’importance des signes extérieurs de la maladie a dû reculer derrière les points de vue qui ressortent des conditions d’apparition, d’évolution et de terminaison. Tous les purs syndromes ont ainsi disparu de la nosologie. »
La dichotomie kraepelinienne (dementia praecox / folie maniaco-dépressive) s’est confrontée à l’hostilité de l’école française, elle-même par ailleurs très embarrassée dans ses errements autour de la dégénérescence. Pour autant, elle vise à l’épure et s’impose par sa clarté et son homogénéité. La maladie mentale se voit donc amenée à être considérée dans ses aspects évolutifs : « Le même processus morbide peut se présenter sous des aspects cliniques différents ». « La doctrine des tableaux [Formenlehre] était devenue une doctrine des métamorphoses [Metamorphosenlehre]. On ne cherchait plus à voir maintenant dans les différents tableaux symptomatologiques différentes espèces de maladies, mais des phases différentes, des métamorphoses d’une même maladie, ou peut-être d’un petit nombre de maladies différentes. »
Coexistence ou continuum ?
La Folie maniaco-dépressive de Kraepelin préfigure les Troubles bipolaires, dont la dénomination ne sera que plus tardive. Si l’intégration du terme dans les classifications internationales sera célébrée par certains comme une renaissance de la Folie circulaire de Jean-Pierre Falret, nous devons plus raisonnablement souligner que c’est l’approche classificatoire de Kraepelin qui a influencé les représentations actuelles de la nosographie psychiatrique.
Pourtant, ce qui semblait au cœur du raisonnement de Falret nous éclaire davantage sur la dynamique actuelle qui accompagne l’essor des roubles bipolaires. Pour Kraepelin, l’évolution terminale prédomine, ce qu’Henri Ey pouvait commenter d’un lapidaire : « la schizophrénie est à la fin. » Mais à partir des années 1950 semblent ressurgir les questionnements du siècle précédent : les troubles bipolaires sont-ils alternance, spectre ou continuum ? Karl Kleist et son élève Karl Leonhard concourent amplement à la détermination moderne de ce champ de « pathologies de l’humeur », qui reprend de l’importance face au développement grandissant de la schizophrénie et regagne son autonomie en 1966 lorsque le suisse Jules Angst et le suédois Carlo Perris démontrent la spécificité de son hérédité. Paradoxalement, cette « approbation scientifique » du phénomène bipolaire ne consiste pas, car ces derniers auteurs s’accordent d’emblée sur la nécessité de démembrer la psychose maniaco-dépressive en trois entités qu’ils appelèrent l’une bipolaire, les deux autres, respectivement dépressive et maniaque, unipolaire…
Les continuateurs de la recherche sur les « affective disorders », de Winokur, jusqu’au très actuel Akiskal, tendent assez curieusement à affiner la clinique des troubles bipolaires, par une profusion de sous classifications, tout en insistant sur la cohésion de l’entité. D’une part elle se morcelle ; d’une autre elle se trouve confortée dans une homogénéité médicale. Les arguments se succèdent et sont mis en série, quand bien même leur hétérogénéité est flagrante : efficacité des traitements thymorégulateurs, similitudes dans les études d’hérédité ou d’agrégation familiale.
Schématiquement, les troubles de l’humeur sont subdivisés en troubles majeurs et troubles partiels. Les premiers, parfois dénommés « phénotypes purs » impliquent une symptomatologie majeure (c’est-à-dire clairement maniaque). Les second ou « phénotypes atténués », sont caractérisés par une symptomatologie moins accentuée (hypomaniaque) ou chronique, entrant par la même dans le champ des « pathologies du tempérament ».
Par ce curieux retournement, l’entité régresse donc à nouveau vers une manifestation de la personnalité. D’une certaine façon elle se dégrade et risque, à s’étendre sous forme d’un « spectre », de perdre les caractéristiques d’une « maladie » qui ont pourtant procédé à sa constitution. Falret voulait éloigner son regard sur la maladie mentale de la simple manifestation d’une « personnalité ». Cent cinquante ans plus tard, la nosologie médicale triomphante en revient au registre du caractère et du tempérament, cherchant à lire dans ceux-ci les premiers signes du trouble.
Inadéquation ou dysharmonie ?
Au-delà de ce retournement, une autre considération s’impose. Il s’agit des signes cliniques « associés » au trouble bipolaire. En effet, celui-ci se trouve, dans les classifications, particularisé par la présence ou l’absence de caractéristiques psychotiques, désignant par là la présence ou l’absence de délire ou d’hallucinations. Exclusif de celui de schizophrénie, le diagnostic de trouble bipolaire se situe hors du champ de la « psychose » stricto sensu. Il instaure la dimension proéminente d’une pathologie de l’humeur, héritière de l’ « affective disorder » de Maudlsey, retraduite en « mood disorder ». Cette dimension insaisissable de l’humeur, « disposition affective fondamentale » selon le mot de Jean Delay, se trouve dès lors aux commandes de la représentation médicale du trouble. L’état émotionnel, l’émotion devient ainsi prééminente dans la hiérarchisation de ce qui fonde le trouble bipolaire.
La perspective continuiste prime dès lors car la représentation médicale des émotions les expose dans la palette d’un continuum allant du neutre au plus vif, dans l’exaltation ou le désespoir. Cette grille de lecture prévaut. Les discussions classiques quant à la distinction entre « manie délirante » et « schizophrénie exaltée » n’ont plus lieu car l’expression de la tonalité affective, d’une manière quasi barométrique, suffit au repérage diagnostique. Le délire devient accessoire. Il constitue un « signe », une « caractéristique » corrélée à l’intensité du dysfonctionnement de l’humeur ou plus précisément à son dérèglement. Son existence se trouve justifiée par l’exacerbation de l’humeur. Congruent ou non à celle-ci, il est le reflet d’une rupture dans l’harmonie des choses. Il est donc à entendre comme inadéquation. En somme, le phénomène psychotique, à être considéré isolément et subordonné au trouble bipolaire est réduit à un défaut d’ajustement aux variations – quand bien même sont-elles – pathologiques de l’humeur. Soulignons à cette évocation de l’ajustement, que c’est cette présupposition qui sous-tend déjà une large proportion de la nosographie psychiatrique, sous les égides du « stress ». Conceptualisée à partir du Syndrome Général d’Adaptation de Selye, la portée biologisante du stress permet d’interpréter en termes d’ajustement, d’adaptation et d’adéquation, bon nombre de nos « états d’âme » (5).
C’est précisément cette interprétation des effets de la classification qui peut nous faire redouter les conséquences d’une théorisation aussi universalisante des troubles de l’humeur.
Freud, avec le terme d’affect, insiste sur la transposition, sur le déplacement. Comme le reprend Lacan, dans Télévision, l’affect est déplacement, il est discord. L’harmonie n’est pas la règle chez l’être dès lors qu’il est parlant. Il ne lui reste comme alternative que de s’y retrouver dans l’inconscient, dans la structure ou de tenter l’effort du Bien-dire.
(1) « Au lieu de voir dans l’aliénation partielle, une ou plusieurs conceptions délirantes, se produisant par une sorte de déduction logique, analogue à celle qui donne naissance aux erreurs de l’état normal ; au lieu d’y voir une filiation motivée, s’accomplissant par gradations insensibles, partant de la cause morale qui est supposée avoir occasionné la maladie, se poursuivant par un enchaînement successif, depuis les premiers symptômes observés jusqu’aux idées délirantes de la maladie confirmée, nous intervertissons complètement cet ordre de succession des phénomènes, et nous comprenons tout autrement la pathogénie du délire. »
(2) Tantôt le cercle est décrit en trois semaines ou un mois, tantôt il n’est complet qu’après plusieurs mois ou plusieurs années. Du reste, que l’évolution soit lente ou rapide, ce caractère de durée ne change rien à la nature de la maladie ; elle reste la même dans ses traits généraux, comme dans ses principaux détails.
(3) Des maladies mentales et des asiles d’aliénés, Paris : Baillière et fils, 1864.
(4) « C’est pourquoi s’impose de plus en plus au médecin le devoir de se familiariser dans la mesure du possible, avec les manifestations de la folie bien que les limites de son pouvoir soient fort restreintes en face d’un si redoutable adversaire. »
« Nous n’y pouvons rien […] qu’il s’amende de lui-même. […] Et s’il nous gêne et ne guérit pas, nous avons le droit de l’isoler, de l’exclure. »
« Méfions-nous, méfiez-vous, jeunes médecins qui m’écoutez, le fou est dangereux et le restera jusqu’à sa mort qui, malheureusement, n’arrive que rarement rapidement ! »
(5) C. Lane. Comment la psychiatrie et l’industrie pharmaceutique ont médicalisé nos émotions. Flammarion : Paris, 2009.